IPCC Fourth Assessment Report: Climate Change 2007
Rapport du Groupe de travail I - Les éléments scientifiques

RT 5.1. Comprendre les changements climatiques à court terme

La connaissance du système climatique et les simulations modélisées confirment que les variations passées de la concentration des gaz à effets de serre mèneront à un réchauffement engagé (lire la définition à l’encart RT.9) et des changements climatiques futurs. Les nouveaux résultats de modèles pour les expérimentations dans lesquelles la concentration de tous les agents de forçage est maintenue à un niveau constant fournissent de meilleures estimations du changement engagé dans les variables atmosphériques, en raison du long temps de réponse du système climatique, en particulier celui des océans. {10.3, 10.7}

Encart RT.9. Les changements climatiques engagés

Si la concentration de gaz à effet de serre et d’aérosols restait constante après une période de variation, le système climatique continuerait à répondre en raison de l’inertie thermique des océans et des nappes glaciaire et de la longue échelle temporelle qui caractérise leur ajustement au changement. Le « réchauffement engagé » est ici défini comme la continuation de la variation de la température moyenne mondiale après que la composition de l’atmosphère, et donc le forçage radiatif, aura été maintenu à un niveau constant. Les changements engagés impliquent aussi d’autres aspects du système climatique, en particulier le niveau de la mer. Il convient de noter que pour que les éléments qui ont un impact sur le forçage radiatif soient maintenus à un niveau de concentration constant, les émissions devraient être égales aux sorties naturelles du système, ce qui, pour la plupart des éléments, impliquerait une réduction massive des émissions, bien que les expérimentations modélisées n’aient pas été conçues comme des scénarios d’émissions. {FAQ 10.3}

La troposphère s’adapte aux variations survenant à ses confins au cours de périodes inférieures à un mois environ. Les couches superficielles des océans répondent sur une échelle temporelle de plusieurs années à plusieurs décennies. La réponse des profondeurs des océans et des nappes glaciaires s’étale sur des siècles, voire des millénaires. Lorsque le forçage radiatif varie, les propriétés internes de l’atmosphère ont tendance à s’ajuster rapidement. Cependant, comme l’atmosphère est étroitement liée à la couche océanique des eaux mélangées, laquelle est à son tour liée à la couche profonde de l’océan, l’équilibre des variables atmosphériques n’est pas atteint avant un temps très long. Au cours de ces longues périodes durant lesquelles le climat de surface change très lentement, on peut considérer que l’atmosphère est dans un état de quasi-équilibre, et que la plus grande part de l’énergie est absorbée par l’océan. Le réchauffement océanique est ainsi un outil crucial de mesure de changements climatiques. {10.7}

Les projections précédentes du GIEC sur les changements climatiques futurs peuvent maintenant être mises en regard des observations récentes, avec une confiance accrue dans les projections à court termes et la compréhension physique sous-jacente des changements climatiques engagés sur plusieurs décennies. Les projections relatives à la période 1990–2005 établies par le PRE et le DRE suggéraient respectivement une augmentation de la température mondiale moyenne d’environ 0,3°C et 0,15°C par décennie.[10] La différence entre les deux projections était principalement due à l’intégration des effets de refroidissement des aérosols dans le DRE, alors qu’il n’y avait pas de base quantitative pour ce faire dans le PRE. Les projections du PRE étaient similaires à celles du DRE. Ces résultats sont comparables aux valeurs observées qui sont à environ 0,2°C par décennie, comme l’illustre la figure RT.26, ce qui apporte un facteur de confiance important à ce genre de projection à court terme. Une partie du réchauffement observé découle de l’effet engagé des variations de la concentration des gaz à effet de serre qui ont eu lieu avant l’époque de ces évaluations plus anciennes. {1.2, 3.2}

Figure RT.26

Figure RT.26. Comparaison entre le réchauffement mondial moyen et le réchauffement observé. Comme à la figure RT.6, les variations de température observées sont représentées sous la forme de relevés annuels (puces noires) et de moyenne décennale (courbe noire). Les tendances projetées et leur amplitude telles que décrites par le premier rapport d’évaluation (PRE) et le deuxième rapport d’évaluation (DRE) sont représentées par des courbes continues verte et mauve entourées d’une zone colorée, et l’amplitude projetée selon le troisième rapport d’évaluation (TRE) est représentée par un hachurage bleu vertical. Ces projections ont été ajustées pour que leur point de départ soit la valeur décennale observée en 1990. Comme à la fig. RT.32, des projections moyennes multi-modèles de ce rapport pour les scénarios B1, A1B et A2 du RSSE sont représentées pour la période courant de 2000 à 2025 sous la forme de courbes bleue, verte et rouge, les marges d’incertitude étant indiquées à droite du tableau, sur l’axe vertical. La courbe orange représente les projections modélisées de réchauffement si les concentrations de gaz à effet de serre et d’aérosols étaient constantes et à leur niveau de l’an 2000 – elle représente donc le réchauffement engagé. {Figures 1.1. et 10.4}

Les changements climatiques engagés (voir encart RT.9) dus à la composition de l’atmosphère en 2000 correspondent à une tendance au réchauffement d’environ 0,1°C par décennie au cours des deux prochaines décennies, en l’absence de changements importants dans le forçage solaire ou volcanique. On s’attend à environ deux fois ce réchauffement (0,2°C par décennie) si les émissions baissaient jusqu’à se trouver dans la fourchette des scénarios marqueurs du RSSE. Ce résultat ne dépend pas du scénario marqueur RSSE choisi, car aucun d’entre eux ne tient compte d’éventuelles initiatives climatiques. L’éventail des réchauffements envisagés pour 2050 reste peu sensible au choix de scénario (1,3°C à 1,7°C par rapport à la période 1980–1999), et un quart environ serait dû aux changements climatiques engagés si tous les facteurs de forçage radiatif étaient stabilisés aujourd’hui. {10.3, 10.5, 10.7}

On s’attend à ce que le niveau de la mer continue à monter au cours des prochaines décennies. De 2000 à 2020, selon le scénario RSSE A1B pour l’ensemble des MCGAO, le rythme projeté de dilatation d’origine thermique serait de 1,3 ± 0,7 mm an–1, et l’usage des scénarios A2 et B1 ne montre pas de différence significative. Ces taux projetés se situent au sein de l’incertitude établie pour la contribution observée de la dilatation thermique de 1993 à 2003, qui s’établissait à 1,6 ± 0,6 mm an–1. Le rapport entre la dilatation thermique engagée causée par la composition atmosphérique constante au niveau des valeurs de l’année 2000 et la dilatation thermique totale (c’est-à-dire le rapport entre la dilatation survenue après 2000 et la dilatation survenue avant et après) est plus important que le rapport correspondant pour la température moyenne mondiale de surface. {10.6, 10.7}

  1. ^  Voir le PRE du GIEC, Rapport à l’intention des décideurs, et le DRE, Résumé technique, fig. 18.