IPCC Fourth Assessment Report: Climate Change 2007
Rapport du Groupe de travail I - Les éléments scientifiques

RT.2.5 Forçage radiatif net au niveau mondial, potentiel de réchauffement climatique et schémas de forçage

La compréhension de l’influence du réchauffement et du refroidissement anthropiques sur le climat s’est améliorée depuis le TRE, permettant d’avancer avec une confiance très élevée que l’effet des activités humaines depuis 1750 a été un forçage positif net de +1,6 [+0,6 à +2,4] W m–2. La compréhension améliorée et la meilleure quantification des mécanismes de forçage depuis le TRE permettent d’établir pour la première fois un forçage radiatif anthropique net combiné. La distribution de probabilité de l’évaluation du forçage radiatif anthropique combiné, présenté à la figure RT.5, provient de la combinaison des valeurs composantes pour chaque agent de forçage et de leurs incertitudes ; la valeur la plus probable est d’environ un ordre de grandeur supérieur au forçage radiatif évalué à partir des variations du rayonnement solaire. Comme l’intervalle d’évaluation va de +0,6 à +2,4 W m–2, on peut établir avec une confiance très élevée l’existence d’un forçage positif net du système climatique en raison de l’activité humaine. Les GESLV contribuent ensemble à +2,63 ± 0,26 W m–2, ce qui représente le forçage radiatif dominant, au niveau de compréhension scientifique le plus élevé. Par contraste, les effets directs des aérosols, l’albédo des nuages et l’albédo de surface contribuent à des contraintes négatives moins bien cernées, et avec de plus grandes incertitudes. La marge dans l’évaluation nette est augmentée par des facteurs de forçage négatifs, qui ont de plus grandes incertitudes que les facteurs positifs. La nature de l’incertitude dans l’effet albédo des nuages estimé introduit une asymétrie considérable dans la distribution. Les incertitudes dans la distribution incluent des aspects structurels (par exemple, la représentation d’extrêmes dans les valeurs composantes, l’absence de toute pondération des mécanismes de forçage radiatif, l’existence de forçages radiatifs non encore pris en compte ni évalués quantitativement) et des aspects statistiques (par exemple, des suppositions des types de distributions décrivant des incertitudes des composantes). {2.7, 2.9}

Figure RT.5

Figure RT.5. (a) Forçages radiatifs (FR) moyens à l’échelle mondiale, et leurs intervalles de confiance de 90% en 2005 pour divers agents et mécanismes. Dans les colonnes de droite sont indiquées les meilleures estimations et les intervalles de confiance (valeurs FR) ; mesure géographique typique du forçage (échelle spatiale) ; et niveau de compréhension scientifique (LOSU) indiquant le niveau de confiance scientifique tel qu’expliqué à la section 2.9. Les erreurs pour CH4, N2O et les halocarbures ont été combinées. La figure illustre aussi le forçage radiatif anthropique net et sa marge d’erreur. Les meilleures estimations et les marges d’incertitude ne peuvent pas être obtenues par l’addition des termes individuels en raison des marges d’incertitude asymétriques pour quelques facteurs ; les valeurs données ici ont été obtenues à l’aide de la méthode Monte-Carlo comme discuté à la section 2.9. Les facteurs de forçage supplémentaires non inclus ici sont considérés comme ayant un LOSU très bas. Les aérosols volcaniques sont considérés comme une forme supplémentaire de forçage naturel, mais ne sont pas inclus ici en raison de leur nature épisodique. La marge d’erreur pour les cotras d’aviation n’inclut pas les autres effets possibles de l’aviation sur la nébulosité. (b) Distribution de la probabilité du forçage radiatif combiné moyen mondial de tous les agents anthropiques présentés dans (a). La distribution est calculée en combinant les meilleures estimations et les incertitudes de chaque composant. L’écart de la distribution est significativement augmenté par les termes de forçage négatifs, qui ont de plus grandes incertitudes que les termes positifs. {2.9.1, 2.9.2; Figure 2.20}

Le potentiel de réchauffement planétaire (PRP) est une mesure utile pour comparer l’impact climatique potentiel des émissions de différents GESLV (voir le tableau RT.2). Les potentiels de réchauffement planétaire comparent le forçage radiatif intégré au cours d’une période définie (par exemple, 100 ans) d’une émission indiquée en unités de masse, et sont une façon de comparer le changement climatique potentiel associé aux émissions des différents gaz à effet de serre. Les défauts du concept de potentiel de réchauffement climatique sont bien documentés, particulièrement lorsqu’il est utilisé pour évaluer l’impact d’espèces de courte durée de vie. {2.10}

Pour décrire l’ampleur et la gamme de forçages réalistes considérés, les preuves laissent à penser qu’il existe une relation approximativement linéaire entre le forçage radiatif moyen global et la réponse moyenne globale de la température de surface. Les modèles spatiaux de forçage radiatif varient entre des agents de forçage différents. Cependant, on ne s’attend généralement pas à une réponse climatique spatiale perceptible correspondant à celle du forçage. Le type de réponse climatique spatiale est en grande partie contrôlé par des processus climatiques et leurs réactions. Par exemple, la rétroaction de la modification de l’albédo suite à la fonte des glaces de mer a tendance à augmenter la réponse à haute latitude. Les modèles spatiaux de réponse sont aussi affectés par des différences d’inertie thermique entre la terre et les régions marines. {2.8, 9.2}

Le type de réponse à un forçage radiatif peut fortement varier si sa structure est apte à affecter un aspect particulier de la structure atmosphérique ou de la circulation. Les études de modélisation et des comparaisons de données suggèrent que les schémas de circulation à moyenne et haute latitude sont probablement affectés par des contraintes du type éruptions volcaniques, qui ont été liées avec des changements dans l’oscillation arctique (AO – ou oscillation annulaire nord, NAM) et l’oscillation Nord- Atlantique (NAO) (cf. section 3.1 et l’encart RT.2). Les simulations suggèrent aussi que l’absorption d’aérosols, et particulièrement le carbone noir, peut réduire la radiation solaire atteignant la surface et peut réchauffer l’atmosphère à l’échelle régionale, affectant le profil vertical de température et la circulation atmosphérique à grande échelle. {2.8, 7.5, 9.2}

Les modèles spatiaux de forçages radiatifs pour l’ozone, les effets directs des aérosols, les interactions nuages / aérosols et l’affectation des terres ont des incertitudes considérables, contrairement à la confiance relativement élevée dans les modèles spatiaux de forçage radiatifs pour les GESLV. Le forçage radiatif positif net dans l’hémisphère sud dépasse très probablement celui dans l’hémisphère nord à cause des moindres concentrations d’aérosols au sud. {2.9}

Tableau RT.2. Durées de vie, efficacité radiative et potentiels directs de réchauffement planétaires (PRP) (hormis le CH4) relatifs au CO2. {Tableau 2.14}

       Potentiel de réchauffement climatique 
Désignation industrielle ou nom commun (années)   Formule chimique   Durée de vie [années]  Efficacité radiative (W m–2 ppb–1)  SAR (sur 100 ans)  sur 20 ans  sur 100 ans  sur 500 ans 
Dioxyde de carbone  CO2  (note)a  b1,4x10–5  1  1  1  
Méthanec  CH4  12c  3,7x10–4  21  72  25  7,6 
Protoxyde d’azote  N2O  114  3,03x10–3  310  289  298  153 
Substances contrôlées par le protocole de Montréal  
CFC-11  CCl3F  45  0,25  3 800  6 730  4 750  1 620 
CFC-12  CCl2F2  100  0,32  8 100  11 000  10 900  5 200 
CFC-13  CClF3  640  0,25    10 800  14 400  16 400 
CFC-113  CCl2FCClF2  85  0,3  4 800  6 540  6 130  2 700 
CFC-114  CClF2CClF2  300  0,31    8 040  10 000  8 730 
CFC-115  CClF2CF3  1 700  0,18    5 310  7 370  9 990 
Halon-1301  CBrF3  65  0,32  5 400  8 480  7 140  2 760 
Halon-1211  CBrClF2  16  0,3    4 750  1 890  575 
Halon-2402  CBrF2CBrF2  20  0,33    3 680  1 640  503 
Tétrachlorure de carbone  CCl4  26  0,13  1 400  2 700  1 400  435 
Bromure de méthyle  CH3Br  0,7  0,01    17  5  
Méthyl chloroforme  CH3CCl3  5  0,06    506  146  45 
HCFC-22  CHClF2  12  0,2  1 500  5 160  1 810  549 
HCFC-123  CHCl2CF3  1,3  0,14  90  273  77  24 
HCFC-124  CHClFCF3  5,8  0,22  470  2 070  609  185 
HCFC-141b  CH3CCl2F  9,3  0,14    2 250  725  220 
HCFC-142b  CH3CClF2  17,9  0,2  1 800  5 490  2 310  705 
HCFC-225ca  CHCl2CF2CF3  1,9  0,2    429  122  37 
HCFC-225cb  CHClFCF2CClF2  5,8  0,32    2 030  595  181 
Hydrofluorocarbures 
HFC-23  CHF3  270  0,19  11 700  12 000  14 800  12 200 
HFC-32  CH2F2  4,9  0,11  650  2 330  675  205 
HFC-125  CHF2CF3  29  0,23  2 800  6 350  3 500  1 100 
HFC-134a  CH2FCF3  14  0,16  1 300  3 830  1 430  435 
HFC-143a  CH3CF3  52  0,13  3 800  5 890  4 470  1 590 
HFC-152a  CH3CHF2  1,4  0,09  140  437  124  38 
HFC-227ea  CF3CHFCF3  34,2  0,26  2 900  5 310  3 220  1 040 
HFC-236fa  CF3CH2CF3  240  0,28  6 300  8 100  9 810  7 660 
HFC-245fa  CHF2CH2CF3  7,6  0,28    3 380  1 030  314 
HFC-365mfc  CH3CF2CH2CF3  8,6  0,21    2 520  794  241 
HFC-43-10mee  CF3CHFCHFCF2CF3  15,9  0,4  1 300  4 140  1 640  500 
Composés perfluorés  
Hexafluorure de soufre  SF6  3 200  0,52  23 900  16 300  22 800  32 600 
Trifluorure d’azote  NF3  740  0,21    12 300  17 200  20 700 
PFC-14  CF4  50 000  0,10  6 500  5 210  7 390  11 200 
PFC-116  C2F6  10 000  0,26  9 200  8 630  12 200  18 200 

       Potentiel de réchauffement climatique 
Désignation industrielle ou nom commun (années)   Formule chimique   Durée de vie [années]  Efficacité radiative (W m–2 ppb–1)  SAR (sur 100 ans)  sur 20 ans  sur 100 ans  sur 500 ans 
Composés perfluorés (suite)  
PFC-218  C3F8  2 600  0,26  7 000  6 310  8 830  12 500 
PFC-318  c-C4F8  3 200  0,32  8 700  7 310  10 300  14 700 
PFC-3-1-10  C4F10  2 600  0,33  7 000  6 330  8 860  12 500 
PFC-4-1-12  C5F12  4 100  0,41    6 510  9 160  13 300 
PFC-5-1-14  C6F14  3 200  0,49  7 400  6 600  9 300  13 300 
PFC-9-1-18  C10F18  >1 000d  0,56    >5 500  >7 500  >9 500 
trifluorométhyl pentafluorure de soufre SF5CF3  800  0,57    13 200  17 700  21 200 
Ethers fluorés  
HFE-125  CHF2OCF3  136  0,44    13 800  14 900  8 490 
HFE-134  CHF2OCHF2  26  0,45    12 200  6 320  1 960 
HFE-143a  CH3OCF3  4,3  0,27    2 630  756  230 
HCFE-235da2  CHF2OCHClCF3  2,6  0,38    1 230  350  106 
HFE-245cb2  CH3OCF2CHF2  5,1  0,32    2 440  708  215 
HFE-245fa2  CHF2OCH2CF3  4,9  0,31    2 280  659  200 
HFE-254cb2  CH3OCF2CHF2  2,6  0,28    1 260  359  109 
HFE-347mcc3  CH3OCF2CF2CF3  5,2  0,34    1 980  575  175 
HFE-347pcf2  CHF2CF2OCH2CF3  7,1  0,25    1 900  580  175 
HFE-356pcc3  CH3OCF2CF2CHF2  0,33  0,93    386  110  33 
HFE-449sl (HFE-7100)  C4F9OCH3  3,8  0,31    1 040  297  90 
HFE-569sf2 (HFE-7200)  C4F9OC2H5  0,77  0,3    207  59  18 
HFE-43-10pccc124 (H-Galden 1040x)  CHF2OCF2OC2F4OCHF2  6,3  1.37    6 320  1 870  569 
HFE-236ca12 (HG-10)  CHF2OCF2OCHF2  12,1  0,66    8 000  2 800  860 
HFE-338pcc13 (HG-01)  CHF2OCF2CF2OCHF2  6,2  0,87    5 100  1 500  460 
Ethers perfluorés  
PFPMIE  CF3OCF(CF3)CF2OCF2OCF3  800  0,65    7 620  10 300  12 400 
Hydrocarbures et autres composants – Effets directs  
Diméthyléther  CH3OCH3  0,015  0,02    1  1  <<1 
Dichlorométhane  CH2Cl2  0,38  0,03    31  8,7  2,7 
Chlorométhane  CH3Cl  1,0  0,01    45  13  

Notes:

DRE se réfère au rapport d’évaluation du GIEC en 1995, développé dans le cadre de la CCNUCC.

a La fonction de réponse du CO2 utilisée dans ce rapport est basée sur la version révisée du modèle de cycle carbonique de Berne utilisé au chapitre 10 du présent rapport (Bern2.5CC; Joos et d’autres 2001), qui utilise une valeur de concentration de fond de CO2 de 378 ppm. La dégradation du CO2 en fonction du temps t est fournie par la relation

où a0 = 0,217, a1 = 0,259, a2 = 0,338, a3 = 0,186, τ1 = 172,9 ans, τ2 = 18,51 ans et τ3 = 1 186 ans, pour t < 1 000 ans.

b L’efficacité radiative de CO2 est calculée utilisant l’expression simplifiée développée dans le GIEC (1990) et révisée dans le TRE, avec une valeur de concentration de fond mise à jour de 378 ppm et une perturbation de +1 ppm (cf. Section 2.10.2).

c La durée de vie de la perturbation créée par le CH4 est de 12 ans, comme dans le TRE (cf. également Section 7.4). Le potentiel de réchauffement climatique pour le CH4 comprend des effets indirects tels des augmentations d’ozone et de vapeur d’eau dans la stratosphère (cf. Section 2.10).

d La durée de vie estimée à 1000 ans est une limite inférieure.