L’ampleur des impacts
L’ampleur des impacts peut maintenant être estimée de façon plus systématique pour différentes augmentations possibles de température moyenne planétaire.
Depuis la troisième Rapport d’évaluation du GIEC, de nombreuses études supplémentaires, effectuées notamment dans les régions qui n’avaient fait l’objet que de peu de recherches, ont permis L’ampleur des impacts peut maintenant être estimée de façon plus systématique pour différentes augmentations possibles de température moyenne planétaire.
La Figure RID.2 fournit des exemples qui illustrent ces nouvelles informations. L’évaluation a attribué un degré de confiance élevé aux données qui ont été sélectionnées en fonction de leur pertinence présumée par rapport à la population et à l’environnement. Tous les exemples d’incidences sont tirés des chapitres de l’Évaluation, dans lesquels on trouvera des informations plus détaillées.
Selon les cas, certaines incidences pourraient être associées à des « vulnérabilités clés », basées sur des critères documentés (ampleur, durée, persistance/intermittence, potentiel d’adaptation, répartition spatio-temporelle, probabilité et « importance » des incidences). Le but de l’évaluation des vulnérabilités clés potentielles est de fournir des informations sur les rythmes et niveaux des changements climatiques, afin d’aider les décideurs à prendre les mesures appropriées face aux risques des changements climatiques [19.ES, 19.1].
Les « sources d’inquiétude » identifiées dans la troisième Rapport d’évaluation constituent un cadre toujours d’actualité pour l’étude des vulnérabilités clés. Des recherches récentes ont permis de mettre à jour certaines conclusions formulées dans la Troisième évaluation. [19.3].
Les impacts dus aux changements de fréquence et d’intensité des événements météorologiques extrêmes, climatiques, et liés au niveau de la mer sont très susceptibles d’augmenter.
Depuis le troisième Rapport d’évaluation du GIEC, on a acquis une plus grande confiance que certains évènements météorologiques extrêmes vont surpasser en fréquence, en étendue et/ou en intensité ceux du XXIe siècle; et ce, d’autant plus que les effets potentiels de ces changements nous sont mieux connus. Ceux-ci sont résumés au tableau RID.1.
Tableau RID.1. Exemples d’effets potentiels du changement climatique dus à des évènements météorologiques et climatiques extrêmes. Basés sur des projections portant sur la deuxième moitié du XXIe siècle. Les changements ou l’évolution de la capacité d’adaptation ne sont pas pris en compte. Des exemples détaillés point par point se trouvent dans l’Évaluation (voir la source en haut des colonnes). Les deux premières colonnes du Tableau (colorées en jaune) sont directement tirées du quatrième Rapport d’évaluation du Groupe de travail I (Tableau RID.2). La probabilité des estimations de la colonne 2 concerne les phénomènes énumérés dans la colonne 1. La direction de la tendance et la probabilité des phénomènes se rapportent aux projections du changement climatique du RSSE.
Phénomènesa et orientation de la tendance | Probabilité des tendances futures, sur la base des projections des scénarios du RSSE pour le XXIe siècle | Exemples de projections des principaux impacts, secteur par secteur |
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Agriculture, sylviculture et écosystèmes [4.4, 5.4] | Ressources en eau [3.4] | Santé publique [8.2, 8.4] | Industrie, établissements humains et sociétés [7.4] |
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Dans presque toutes les régions terrestres, journées plus chaudes et moins de nuits et de journées froides, journées et nuits chaudes plus fréquentes | Pratiquement certainb | Récoltes en augmentation dans un environnement plus froid; récoltes en diminution dans un environnement plus chaud; recrudescence des invasions d’insectes | Effets sur les ressources en eau dépendant de la fonte des neiges; effet sur certains systèmes d’appro-visionnement en eau | Mortalité humaine en diminution car moins d’exposition au froid | Demande énergétique réduite pour le chauffage; augmentation de la demande en climatisation; dégradation de la qualité de l’air dans les villes; moins d’interruptions dans les transports dues à la neige et au verglas; conséquences sur le tourisme hivernal |
Périodes de chaleur/canicules. Fréquence accrue dans presque toutes les régions terrestres | Très probable | Récoltes en diminution dans des régions plus chaudes en raison de stress thermique; danger accru de feux de forêt | Augmentation de la demande en eau; problèmes liés à la qualité de l’eau (invasion d’algues, p.ex.) | Risque accru de mortalité due à la chaleur; en particulier les personnes âgées, les malades chroniques, les jeunes enfants et les exclus | Dégradation de la qualité de vie des personnes habitant des régions chaudes dans des conditions inadéquates; effets sur les personnes âgées, les jeunes enfants et les démunis |
Fortes précipitations. Fréquence accrue dans presque toutes les régions terrestres | Très probable | Dégâts aux cultures; érosion des sols; impossibilité de cultiver la terre en raison de terrains détrempés | Effets néfastes sur la qualité des eaux de surface et souterraines; contamination des sources aquifères; le stress hydrique pourrait s’alléger | Risque accru de mortalité, d’accidents et maladies infectieuses des voies respiratoires et de la peau | Dysfonctionnement des établissements humains, des commerces, des transports et des communautés à cause d’inondations; pressions sur les infrastructures urbaines et rurales; pertes de biens |
Augmentation des régions touchées par les sécheresses | Probable | Dégradation des sols; diminution des récoltes/récoltes endommagées et pertes des récoltes; mort du cheptel; danger accru d’incendies | Augmentation du stress hydrique | Risque accru de pénurie d’aliments et d’eau; risque accru de malnutrition; risque accru de maladies liées à l’eau et aux aliments | Pénurie d’eau pour les établissements humains, l’industrie et les communautés; diminution de la production hydroélectrique; réduction du potentiel hydroélectrique; possibilités de phénomènes migratoires de populations |
Augmentation de l’intensité des cyclones tropicaux | Probable | Dégâts causés aux récoltes; arbres déracinés par le vent; dégâts causés aux récifs coralliens | Pannes de courant provoquant des coupures d’eau chez les utilisateurs | Risque accru de mortalité, d’accidents et de maladies liées à l’eau et aux aliments; chocs post-traumatiques | Dérèglements dus aux inondations et aux vents tempétueux; résiliation des contrats d’assurances des risques dans les zones vulnérables par des assureurs privés; possibilités de phénomènes migratoires des populations; pertes de biens |
Augmentation des effets d’une montée extrême du niveau de la mer (à l’exception des tsunamis)c | Probabled Augmentation des effets d’une montée extrême du niveau de la mer (à l’exception des tsunamis)c | Salinisation des eaux d’irrigation, des estuaires et des systèmes d’eau douce | Diminution d’eaux douces due à l’intrusion d’eau salée | Risque accru de décès et d’accidents par noyade lors d’inondations; effets sur la santé liés à la migration | Coût de la protection côtière opposé aux coûts d’une réaffectation des terres; possibilités de déplacement de la population et des infrastructures; voir ci-dessus la question des cyclones tropicaux |
L’orientation des tendances et la probabilité des phénomènes proviennent des projections de changements climatiques exposées dans le RSSE du GIEC.
Certains évènements climatiques de grande amplitude peuvent avoir des conséquences considérables, surtout au-delà du XXIe siècle.
Une forte élévation du niveau de la mer résultant d’une déglaciation massive des nappes glaciaires du Groenland et de l’Antarctique implique que le littoral et les écosystèmes subiraient des modifications importantes et que des inondations envahiraient les basses terres, avec des conséquences dévastatrices, en particulier dans les deltas fluviaux. Déplacer les populations, les activités économiques et l’infrastructure représenterait un processus coûteux et complexe. Si la température mondiale moyenne s’élevait de 1 à 4°C (par rapport aux années 1990-2000), la déglaciation, ne serait-ce que partielle, de l’inlandsis groenlandais et la possible déglaciation de l’Antarctique ouest, pourrait s’étaler sur des siècles, voire des millénaires, et contribuerait à faire monter le niveau de la mer de 4-6 m ou plus ; cette assertion présente un degré de confiance moyen. La fonte totale des inlandsis groenlandais et de l’Antarctique ouest ferait monter le niveau de la mer, respectivement, de 7 m et 5 m environ [Quatrième Rapport d’évaluation du Groupe de travail I 6.4, 10.7; Quatrième Rapport d’évaluation du Groupe de travail II 19.3].
D’après les résultats des modèles climatiques, il est très improbable que la circulation thermohaline (MOC) de l’Atlantique Nord soit subitement bouleversée au cours du XXIe siècle. Il est très probable qu’elle ralentisse au cours du siècle, mais les projections indiquent que le réchauffement mondial entraînera néanmoins une hausse des températures dans les régions atlantiques et en Europe. Des changements importants et persistants de la circulation thermohaline vont probablement avoir des effets sur le rendement de l’écosystème marin, la pêche, l’absorption du dioxyde de carbone océanique, les concentrations océaniques en oxygène et la végétation terrestre [Quatrième Rapport d’évaluation du Groupe de travail I 10.3, 10.7; Quatrième Rapport d’évaluation du Groupe de travail II 12.6, 19.3].
Les incidences des changements climatiques varieront selon les régions, mais globalement, par rapport à aujourd’hui, elles imposeront très probablement des coûts annuels nets qui iront croissant à mesure de la hausse des températures à l’échelle planétaire.
La présente Évaluation indique clairement que les conséquences des changements climatiques futurs varieront selon les régions. D’après les projections, une hausse des températures mondiales moyennes inférieure à 1 à 3°C par rapport aux niveaux de 1990, aura des conséquences profitables pour certaines régions et certains secteurs, mais sera source de dépenses pour d’autres. Cependant, toujours d’après les projections, même une hausse négligeable des températures occasionnerait des coûts nets à certaines régions polaires et à latitude basse. Si la hausse des températures dépassait les 2 à 3°C, il est très probable que toutes les régions auraient à faire face soit à une diminution des avantages nets, soit à une augmentation nette des dépenses [9.ES, 9.5, 10.6, T10.9, 15.3, 15.ES]. Ces observations confirment les preuves développées dans le troisième Rapport d’évaluation, selon lesquelles un réchauffement de 4°C entraînerait un pourcentage de pertes plus important dans les pays en développement, mais que les pertes moyennes au niveau mondial pourraient atteindre 1 à 5% du PIB [F20.3].
Nous disposons maintenant de nombreuses estimations du coût économique total net des dommages provoqués par les changements climatiques dans le monde (autrement dit, le coût social du carbone (CSC), exprimé en termes d’avantages et coûts nets pour l’avenir et réactualisés). Des estimations référencées du CSC pour l’année 2005 indiquent un prix de 43$ US par tonne de carbone (c’est-à-dire 12$ US par tonne de dioxyde de carbone), mais la fourchette est large. Par exemple, dans une étude portant sur 100 estimations, les prix variaient entre 10$ US par tonne de carbone (3$ US par tonne de dioxyde de carbone) et 350$ US par tonne de carbone (95$ US par tonne de dioxyde de carbone) [20.6].
La vaste gamme des CSC est en grande partie fonction des diverses hypothèses concernant la sensibilité du climat, les réponses tardives, la gestion des risques et de l’équité, les incidences, économiques ou non, l’inclusion de pertes potentiellement catastrophiques et les taux d’actualisation. Le coût total des dégâts est très probablement sous-estimé du fait que les chiffres globaux ne peuvent inclure de nombreuses conséquences non chiffrables. Dans l’ensemble, tous les témoignages publiés indiquent que les coûts des changements climatiques seront considérables et augmenteront avec le temps [T20.3, 20.6, F20.4].
Il est pratiquement certain que le total des coûts estimés masque la diversité des conséquences subies par certains secteurs, régions, pays et populations. En certains endroits et parmi des groupements de personnes fortement exposées, très vulnérables et/ou ayant une faible capacité d’adaptation, les coûts nets seront nettement supérieurs aux coûts d’ensemble mondiaux [20.6, 20.ES, 7.4].