IPCC Fourth Assessment Report: Climate Change 2007
Rapport du Groupe de travail III - L’atténuation du changement climatique

Technologies et pratiques d’atténuation

Les mesures visant à réduire les émissions de GES des constructions se répartissent en trois catégories : 1) réduction de la consommation énergétique[13] et de l’énergie intégrée dans les bâtiments ; 2) substitution vers des combustibles moins carbonés, y compris une part plus importante d’énergies renouvelables ; 3) contrôle des émissions de GES non-CO2. Beaucoup de technologies permettent aujourd’hui une réduction de la consommation énergétique des bâtiments grâce à une meilleure isolation[14], à des méthodes de conception et de construction améliorées, des équipements plus efficients et des réductions de la demande en services énergétiques. L’importance relative du chauffage et de la climatisation dépend du climat et varie donc de région en région ; l’efficacité des techniques de conception passive dépend aussi du climat, des distinctions importantes devant être faites entre les régions chaudes et humides et les régions chaudes et sèches. Le comportement des occupants, y compris par l’évitement de la mise en marche inutile des équipements et des standards de température adaptatifs plutôt qu’invariables pour le chauffage et la climatisation est aussi un facteur significatif de réduction de l’énergie utilisée par les bâtiments (bon accord, nombreuses mises en évidence) [6.4].

Potentiel d’atténuation du secteur des constructions

Une réduction des émissions de CO2 substantielle, par l’intermédiaire de l’utilisation de l’énergie dans les bâtiments, peut être atteinte au cours des années à venir en comparaison avec les émissions projetées. L’expérience considérable dont nous disposons par rapport à une large palette de technologies, de pratiques et de systèmes dédiés à l’efficacité énergétique et une expérience tout aussi riche avec les politiques et les programmes de promotion de l’efficacité énergétique dans les bâtiments appuient ce point de vue avec une confiance considérable. Une part significative de ces économies peut être atteinte à l’aide de moyens présentant un moindre coût sur l’entier du cycle de vie, fournissant ainsi des réductions dans les émissions de CO2 qui ont un coût négatif (généralement, le coût des investissements est supérieur, mais les coûts opératifs sont plus bas) (bon accord, nombreuses mises en évidence) [6.4; 6.5].

Ces conclusions sont confirmées par le passage en revue de 80 études [Tableau RT.5) qui montrent que des technologies d’éclairage efficaces sont parmi les mesures de réduction de GES les plus prometteuses au sein des bâtiments, pour presque tous les pays, en termes aussi bien de rentabilité que d’économies potentielles. Vers 2020, 760 Mt d’émissions de CO2 environ peuvent être prévenues par l’adoption des systèmes d’éclairage à coût moindre sur l’entier de la durée de vie dans le monde, pour un niveau de prix du carbone de -160 US$ / tCO2 (c’est-à-dire en faisant un profit économique net). En termes d’importance des économies, l’amélioration de l’isolation et le chauffage par district dans les climats les plus froids, et des mesures d’efficaces liées à la ventilation et à la climatisation dans les climats plus chauds viennent en premier dans la plupart des études, aux côtés de la fourniture de fours de cuisine dans les pays en voie de développement. D’autres mesures qui obtiennent un bon score en termes d’économies potentielles sont le chauffage solaire de l’eau, des appareils ménagers et des systèmes de gestion de l’énergie efficaces.

Tableau RT.5 : Potentiel de réduction des émissions de GES pour le parc de constructions en 2020a [Tableau 6.2].

Région économique Pays/groupes de pays retenus par région Potentiel en % de la situation de référence nationale pour les constructionsb Mesures couvrant le potentiel le plus important  Mesures présentant les options d’atténuation les moins chères 
Pays industrialisés 

É.-U., UE à 15, Canada, Grèce, Australie, République de Corée, Royaume-Uni, Allemagne, Japon

 

Technique:

21%-54%c

Economique (<US$ 0/tCO2-éq):

12%–25%d

Marché:

15%–37%

 

1. Rénovation du gros-œuvre, y compris l’isolation, srt. Les fenêtres et les murs;

2. Systèmes de chauffage;

3. Eclairage efficace, spécialement la substitution d’ampoules fluorescentes compactes (AFC) et de ballasts efficaces.

 

1. Efficacité des appareils ménagers de type TV et de leurs périphériques (en fonction et en attente), des réfrigérateurs, congélateurs, ventilateurs et climatiseurs;

2.équipement de chauffage de l’eau;

3. Bonnes pratiques d’éclairage

 
Economies en Transition 

Russie, Pologne, Croatie, et en groupe: Lettonie, Lituanie, Estonie, Slovaquie, Slovénie, Hongrie, Malte, Chypre, Pologne, République tchèque

 

Technique:

26%–47%e

Economique (<US$ 0/tCO2-éq):

13%–37%f

Marché:

14%

 

1. Pré- et post-isolation, remplacement des composantes des bâtiments, particulièrement les fenêtres ;

2. Eclairages efficaces, en particulier substitution des AFC;

3. Appareils ménagers efficaces, comme les réfrigérateurs et les chauffe-eaux.

 

1. Eclairage et contrôle de l’éclairage efficaces ;

2. Systèmes de contrôle du chauffage et du chauffage de l’eau;

3. Rénovation et remplacement des composantes des bâtiments, particulièrement les fenêtres.

 
Pays en voie de développement 

Myanmar, Inde, Indonésie, Argentine, Brésil, Chine, Equateur, Thaïlande, Pakistan, Afrique du Sud

 

Technique:

18%–41%

Economique (<US$ 0/tCO2-éq):

13%–52%g

Marché:

23%

 

1. Eclairages efficaces, en particulier substitution des AFC, rénovation des éclairages et des lampes à kérosène;

2. Différents types de fours de cuisine améliorés, suivis par des fours à GPL et à kérosène;

3. Appareils ménagers efficaces, comme les réfrigérateurs et les climatiseurs.

 

1. Eclairages efficaces, en particulier substitution des AFC, rénovation des éclairages et lampes à kérosène efficaces;

2. Différents types de fours de cuisine améliorés, à base de biomasse, suivis par des fours à kérosène;

3. Appareils ménagers efficaces, comme les réfrigérateurs et les climatiseurs.

 

Notes

a) Sauf pour les 15 pays de l’UE, la Grèce, le Canada, l’Inde, la Russie pour qui l’année-cible était 2010, et la Hongrie, l’Equateur et l’Afrique du Sud pour qui la cible était 2030.

b) Le fait que le potentiel du marché est plus haut que le potentiel économique pour les pays développés est expliqué par la limitation des études qui ne considèrent qu’un type de potentiel. L’information manque pour des études qui présenteraient probablement un potentiel économique plus important.

c) Les deux pour 2010. Si on utilise la formule approximative suivante : Potentiel 2020 = (1 – ( 1 – Potentiel 2010)20/10 pour extrapoler le potentiel exprimé en pour-cent de la situation de référence dans l’avenir (on postule l’an 2000 comme année de départ), cet intervalle serait de 38-79%.

d) Les deux pour 2010. Si on utilise la formule d’extrapolation cet intervalle serait de 22-44%.

e) Le dernier chiffre se rapporte à 2010 et correspond à 72% en 2020 si on utilise la formule d’extrapolation.

f) Le premier chiffre se rapporte à 2010 et correspond à 24% en 2020 si on utilise la formule d’extrapolation.

g) Le dernier chiffre se rapporte à 2030 et correspond à 38% en 2020 si on utilise la formule d’extrapolation pour dériver le potentiel intermédiaire.

Pour ce qui concerne la rentabilité, des fours de cuisine efficaces viennent au second rang après l’éclairage dans les pays en voie de développement, tandis que les mesures venant au second rang dans les pays industrialisés diffèrent selon la région géographique et climatique. Presque toutes les études traitant des économies en transition (typiquement dans des climats plus froids) ont découvert que les mesures liées au chauffage étaient les plus rentables, y compris l’isolation des murs, des toits, des fenêtres et des sols, de même qu’un contrôle amélioré pour le chauffage par district. Dans les pays développés, des mesures liées aux appareils ménagers sont typiquement identifiées comme les plus efficaces, les climatiseurs se plaçant dans les premiers rangs. Les économies en air conditionné peuvent se révéler plus chères que les autres mesures visant à l’efficacité, mais elles sont toujours rentables, car elles tendent à prendre la place du courant des heures de pointe, le plus cher.

Dans les bâtiments neufs, il est possible de réaliser des économies d’énergies allant jusqu’à 75% ou davantage encore en comparaison avec les pratiques actuelles, généralement sans coûts supplémentaires ou avec un coût supplémentaire minime. Réaliser ces économies supplémentaires exige un processus de conception intégré impliquant des architectes, des ingénieurs, des sous-traitants et les clients, avec une prise en considération complète des perspectives de réduction de la demande passive d’énergie des bâtiments [6.4.1].

Traiter de l’atténuation des GES dans les bâtiments dans pays industrialisés revêt une importance particulière. Les fours de cuisine peuvent être conçus de manière à fonctionner plus efficacement et à brûler les particules plus complètement, fournissant aux habitants une meilleure qualité de l’air à l’intérieur des habitations, tout en réduisant les émissions de GES. Des sources locales de matériaux améliorés et à faible taux de GES peuvent être identifiées. Dans les zones urbaines, et de façon croissante dans les zones rurales, on a besoin de toutes les technologies modernes utilisées dans les pays industrialisés pour réduire les émissions de GES [6.4.1].

Les domaines émergents pour ce qui concerne les économies d’énergie dans les constructions commerciales comprennent l’application des contrôles et des technologies de l’information pour suivre en continu, pour diagnostiquer et pour communiquer sur les défauts des locaux commerciaux (« contrôle intelligent ») ; et les approches systémiques pour réduire le besoin de ventilation, de refroidissement, et de déshumidification. Des fenêtres modernes à faible émissivité, une conception solaire passive, les techniques éliminant les pertes dans les bâtiments et les canalisations, des appareils ménagers énergétiquement efficaces, et le contrôle de la consommation de courant en stand-by ou en veille de même que l’éclairage à l’état solide sont aussi importants, aussi bien pour le secteur résidentiel que pour le secteur commercial de la construction (bon accord, nombreuses mises en évidence) [6.5].

Le comportement, la culture et les choix de consommation des occupants, de même que leurs choix technologiques sont des déterminants majeurs de l’utilisation de l’énergie dans les bâtiments et jouent un rôle fondamental dans la détermination des émissions de CO2. Cependant, la réduction potentielle via les options non technologiques fait rarement l’objet d’évaluations et les effets de levier potentiels des politiques publiques sur ces dernières sont mal compris (bon accord, nombreuses mises en évidence).

Il existe des perspectives de réduction des émissions directes de gaz fluorés dans le secteur de la construction, principalement via l’application globale de bonnes pratiques et de méthodes de réparation, le potentiel d’atténuation pour tous les gaz-F se montant à 0,7 GtCO2-éq en 2015. L’atténuation des fluides réfrigérants halocarbonés implique principalement d’éviter les fuites dans les climatiseurs et les équipements de réfrigération (p.ex., durant la période d’utilisation normale, pour la maintenance et en fin de vie) et en réduisant l’usage des halocarbures dans les équipements neufs. Un facteur-clé pour déterminer si ce potentiel sera réalisé réside dans les coûts associés avec la mise en place des mesures pour atteindre la réduction des émissions. Ceux-ci varient considérablement, passant d’un bénéfice net à 300 US$ / tCO2-éq (bon accord, nombreuses mises en évidence) [6.5].

Potentiel d’atténuation du secteur de la construction

Il existe un potentiel global de réduction effective d’environ 30% des émissions de référence projetées pour le secteur de la construction résidentielle et commerciale, si les coûts montent jusqu’à 20 US$ / tCO2-éq et de 4% supplémentaires si on considère un coût jusqu’à 100 US$ / tCO2-éq. Cependant, en raison des opportunités importantes aux bas niveaux de coûts, le potentiel lié aux coûts élevés n’a été évalué que dans une mesure restreinte. Ce chiffre est donc une sous-estimation. En utilisant les projections d’émissions de référence pour les bâtiments[15] à l’échelle mondiale, ces estimations représentent une réduction d’environ 3,2, 3,6 et 4 GtCO2-éq pour 2020, à zéro, 20 US$/ tCO2-éq et 100 US$ / tCO2-éq respectivement (bon accord, nombreuses mises en évidence) [6.5].

Tableau RT.6 : Projections globales du potentiel d’atténuation CO2 pour 2020, en fonction des coûts [Tableau 6.3].

Régions du monde Émissions de référence en 2020 Potentiel d’atténuation CO2 en fraction des émissions de référence de CO2 en 2020 par catégories de coût (coûts en US$ / tCO2-éq) Potentiel d’atténuation CO2 en valeur absolue en 2020 par catégories de coût (coûts en US$ / tCO2-éq) 
GtCO2-eq <0 0-20 20-100 <100 <0 0-20 20-100 <100 
Monde 11.1 29% 3% 4% 36% 3.2 0.35 0.45 4.0 
OCED (-EET) 4.8 27% 3% 2% 32% 1.3 0.10 0.10 1.6 
EET 1.3 29% 12% 23% 64% 0.4 0.15 0.30 0.85 
Hors OCDE 5.0 30% 2% 1% 32% 1.5 0.10 0.05 1.6 

Note : le potentiel mondial agrégé en fonction des coûts et des régions est basé sur 17 études qui ont reporté les potentiels en détail comme fonction des coûts.

Le potentiel réel est probablement plus élevé, car toutes les options d’efficacité en utilisation finale n’ont pas été prises en compte par les études ; des options non technologiques et leurs avantages associés souvent significatifs ont été omises, de même que les bâtiments modernes, intégrés, à haute efficacité. Cependant, le potentiel du marché est bien moindre que le potentiel économique.

Compte tenu de la quantité limitée d’informations pour 2030, les découvertes sur 2020 pour le potentiel économique jusqu’en 2030 ont été extrapolées pour permettre des comparaisons avec les autres secteurs. Les estimations figurent dans le Tableau RT.7. L’extrapolation des potentiels pour 2030 laisse à penser qu’à l’échelle mondiale, environ 4,5, 5,0 et 5,6 GtCO2-éq / an pourraient être évitées pour des niveaux de coûts <0, <20 et <100 US$ / tCO2-éq respectivement. Cela correspond à 30, 35 et 40% des émissions de référence projetées. Ces chiffres sont associés avec des niveaux de certitude significativement inférieurs à ceux de 2020 en raison du très petit nombre de recherches disponibles pour 2030 (accord moyen, mises en évidence limitées).

Tableau RT.7 : Projections globales du potentiel d’atténuation du CO2 pour 2030, en fonction des coûts, basées sur une extrapolation des chiffres de 2020, en GtCO2 [Tableau 6.4].

Option d’atténuation Région Projections de référence pour 2030 Potentiel si les coûts sont en-dessous de 100 US$/tCO2-éq  Potentiel selon la catégorie de coût  
<0 US$/tCO2 0-20 US$/tCO2 20-100 US$/tCO2 
bas haut <0 US$/tC 0-73 US$/tC 73-367 US$/tC 
Economies d’électricité( OCDE 3.4 0.75 0.95 0.85 0.0 0.0 
EET 0.40 0.15 0.20 0.20 0.0 0.0 
Hors OCDE/EET 4.5 1.7 2.4 1.9 0.1 0.1 
Economies de carburant OCDE 2.0 1.0 1.2 0.85 0.2 0.1 
EET 1.0 0.55 0.85 0.20 0.2 0.3 
Hors OCDE/EET 3.0 0.70 0.80 0.65 0.1 0.0 
Total OCDE 5.4 1.8 2.2 1.7 0.2 0.1 
EIT 1.4 0.70 1.1 0.40 0.2 0.3 
Hors OCDE/EET 7.5 2.4 3.2 2.5 0.1 0.0 
Global 14.3 4.8 6.4 4.5 0.5 0.7 

Notes : Les valeurs absolues des potentiels résultant des économies d’électricité dans le Tableau RT.8 et dans le chapitre 11, Tableau 11.3 ne coïncident pas, en raison de l’application de situations de référence différentes ; cependant, les estimations du potentiel exprimées en pourcentage de la situation de référence sont les mêmes dans les deux cas. Le Tableau 11.3 exclut en outre la partie des réductions d’émissions qui est déjà prise en compte dans le secteur de l’approvisionnement énergétique, tandis que le Tableau RT.7 ne sépare pas ce potentiel du reste.

Les perspectives pour le futur à long terme, en postulant que les options du secteur de la construction bénéficient d’un coût allant jusqu’à 25 US$ / tCO2-éq, identifient un potentiel de réductions s’établissant à environ 7,7 GtCO2-éq en 2050.

  1. ^  Cet élément comptabilise toutes les formes de consommation énergétique dans les bâtiments, électricité comprise.
  2. ^  Le terme « enveloppe thermique » se réfère au gros-œuvre d’un bâtiment considéré sous l’angle de la protection qu’il offre contre les transferts non souhaités de chaleur ou de masses d’air entre l’intérieur et l’extérieur du bâtiment.
  3. ^  Les projections de référence d’émissions de CO2 ont été calculées sur la base de 17 études pour dériver le potentiel global (si une étude ne contenait pas de situation de référence, des projections issues d’un autre rapport sur l’atténuation au niveau national ont été utilisées).