5.4 Évolution des émissions jusqu’à leur stabilisation
Les émissions de GES doivent culminer puis décroître pour que les concentrations atmosphériques de ces gaz se stabilisent. Plus le niveau de stabilisation visé est bas, plus le pic doit être atteint rapidement (figure 5.1). {GT III 3.3, 3.5, RiD}
Les progrès réalisés dans l’élaboration des modèles après la publication du TRE permettent d’évaluer les stratégies d’atténuation concernant plusieurs gaz pour étudier la faisabilité et les coûts de la stabilisation des concentrations de GES. Ces modèles permettent d’explorer un plus large éventail de scénarios que le TRE, notamment pour des niveaux de stabilisation inférieurs. {GT III 3.3, 3.5, RiD}
Les mesures d’atténuation qui seront prises au cours des deux à trois prochaines décennies détermineront dans une large mesure les possibilités de stabiliser les concentrations à un niveau relativement bas. (tableau 5.1 et figure 5.1). {GT III 3.5, RiD}.
Dans le tableau 5.1 sont récapitulés les niveaux d’émissions associés à différentes concentrations de stabilisation ainsi que la hausse correspondante de la température moyenne à la surface du globe à l’équilibre, selon la « valeur la plus probable » de la sensibilité du climat (voir la figure 5.1 pour l’intervalle d’incertitude probable). La stabilisation à un faible niveau de concentration et aux niveaux correspondants de la température à l’équilibre exige que le pic intervienne plus tôt et que les réductions des émissions d’ici 2050 soient plus marquées. La sensibilité du climat est une incertitude fondamentale pour les scénarios d’atténuation qui visent à atteindre des niveaux de températures particuliers. Si elle est élevée, les mesures d’atténuation nécessaires pour atteindre un niveau donné de stabilisation des températures doivent être prises plus tôt et avec plus de rigueur. {GT III 3.3, 3.4, 3.5, 3.6, RiD}
Tableau 5.1. Caractéristiques des scénarios de stabilisation post-TRE et élévation résultante, à l’équilibre et à long terme, de la température moyenne à la surface du globe et du niveau de la mer due à la seule dilatation thermique.a {GT I 10.7; GT III tableau RT.2, tableau 3.10, tableau RiD.5}
Catégorie | Concentration de CO2 au niveau de stabilisation (2005 = 379 ppm)b | Concentration d’équivalent-CO2 au niveau de stabilisation, y compris GES et aérosols (2005 = 375 ppm)b | Année du pic d’émissions de CO2a c | Variation des émissions mondiales de CO2 en 2050 (par rapport aux émissions en 2000)a c | Écart entre la température moyenne du globe à l’équilibre et la température préindustrielle, selon la valeur la plus probable de la sensibilité du climatd e | Écart entre le niveau moyen de la mer à l’équilibre et le niveau préindustriel dû à la seule dilatation thermiquef | Nombre de scénarios évalués |
---|
| ppm | ppm | année | % | °C | mètres | |
---|
I | 350-400 | 445-490 | 2000-2015 | - 85 à - 50 | 2,0 - 2,4 | 0,4 - 1,4 | 6 |
II | 400-440 | 490-535 | 2000-2020 | - 60 à - 30 | 2,4 - 2,8 | 0,5 - 1,7 | 18 |
III | 440-485 | 535-590 | 2010-2030 | - 30 à + 5 | 2,8 - 3,2 | 0,6 - 1,9 | 21 |
IV | 485-570 | 590-710 | 2020-2060 | + 10 à + 60 | 3,2 - 4,0 | 0,6 - 2,4 | 118 |
V | 570-660 | 710-855 | 2050-2080 | + 25 à + 85 | 4,0 - 4,9 | 0,8 - 2,9 | 9 |
VI | 660-790 | 855-1 130 | 2060-2090 | + 90 à +140 | 4,9 - 6,1 | 1,0 - 3,7 | 5 |
Il est inévitable que le réchauffement s’accompagne d’une élévation du niveau de la mer. La dilatation thermique se poursuivra pendant de nombreux siècles après que les concentrations de GES se seront stabilisées, à quelque niveau que ce soit, provoquant une montée des eaux beaucoup plus importante que celle projetée pour le XXIe siècle (tableau 5.1). Si les concentrations de GES et d’aérosols avaient été stabilisées aux niveaux de l’an 2000, la dilatation thermique devrait à elle seule entraîner une élévation du niveau de la mer supplémentaire de 0,3 à 0,8 m. Si la hausse des températures se maintenait pendant des siècles au-delà de la fourchette 1,9-4,6 °C par rapport à l’époque préindustrielle, la fonte de l’inlandsis groenlandais pourrait faire monter le niveau de la mer de plusieurs mètres, pour un apport supérieur à celui de la dilatation thermique. À long terme, cette évolution serait lourde de conséquences pour les zones côtières de la planète. Étant donné les délais en jeu dans la dilatation thermique et la réaction des nappes glaciaires au réchauffement, il s’écoulerait des siècles entre le moment où les concentrations de GES (ou le forçage radiatif) se stabiliseraient aux niveaux actuels ou à des niveaux supérieurs et le moment où le niveau de la mer cesserait à son tour de monter {GT I 10.7}
Les rétroactions entre le cycle du carbone et les changements climatiques ont une incidence sur les mesures d’atténuation et d’adaptation nécessaires. Ces deux cycles étant corrélés, la part des émissions anthropiques subsistant dans l’atmosphère devrait augmenter à mesure que se réchauffe le système climatique (voir les points 2.3 et 3.2.1). Toutefois, les études portant sur l’atténuation n’intègrent pas encore la pleine portée de ces rétroactions. Les réductions d’émissions nécessaires pour atteindre un niveau de stabilisation donné pourraient donc avoir été sous-estimées dans les études d’atténuation évaluées au tableau 5.1. En se fondant sur la compréhension actuelle des rétroactions entre les changements climatiques et le cycle du carbone, les études qui s’appuient sur les modèles suggèrent qu’une stabilisation des concentrations de CO2 à 450 ppm, par exemple, pourrait nécessiter que les émissions cumulées au cours du XXIe siècle soient inférieures à 1 800 [1 370-2 200] Gt CO2, soit environ 27 % de moins que les 2 460 [2 310-2 600] Gt CO2 établis sans tenir compte des rétroactions du cycle du carbone. {RSY 2.3, 3.2.1; GT I 7.3, 10.4, RiD}.